Les différents régimes fiscaux applicables aux sociétés
La fiscalité des sociétés est particulièrement complexe dans la mesure où il existe une multitude de régimes fiscaux applicables aux sociétés. Les développements suivants présentent les quatre grands régimes fiscaux auxquels peuvent être assujetties les sociétés en fonction de leur forme et de leur objet. Il s’agit des régimes de :
– transparence fiscale
– semi-transparence fiscale
– translucidité fiscale
– opacité fiscale : régime de l’impôt sur les sociétés
Ces régimes peuvent être applicables de plein droit, ou dans certains cas, sur option.
Extrait de la thèse de Doctorat en droit fiscal « La transparence fiscale, modèle d’imposition du bénéfice des sociétés« , de Maître Edouard PRUVOST, Avocat fiscaliste, Docteur en droit fiscal.
« L’allégorie de la transparence fiscale[1]. La richesse de la fiscalité engendre souvent une diversité de situations délicates à trouver une qualification appropriée. Parfois, l’allégorie présente l’avantage précieux de mettre en lumière une situation difficilement qualifiable. Le Professeur Maurice COZIAN fut le premier à avoir recours à ce langage qu’il qualifiait « d’opticien[2]» pour désigner les différents régimes fiscaux auxquels peuvent être assujetties les sociétés. A ce titre, nous pourrions définir la transparence fiscale comme une « image[3]» qui traduit le degré d’interposition d’une personne morale entre la réalisation d’un bénéfice par cette personne morale et l’appréhension de ce bénéfice par l’associé de cette personne morale. Ce vocable, utilisé de longue date par la doctrine, paraît tout à fait approprié et utile à une représentation plus accessible de la fiscalité applicable aux personnes morales. Cependant, les nuances entre les différents régimes de transparence fiscale sont nombreuses. Il paraît alors nécessaire de décliner différentes nuances de transparence dans le souci d’obtenir une image toujours représentative de la réalité. Traditionnellement, il est opéré une distinction entre la « transparence fiscale pure », la « semi-transparence fiscale » et la « translucidité fiscale »[4].
La transparence fiscale pure[5] s’applique uniquement aux sociétés visées aux articles L. 212-1 et suivants du Code de la construction et de l’habitation[6]. Selon l’article 1655 ter du Code Général des Impôts, ces sociétés sont réputées « quelle que soit leur forme juridique, ne pas avoir de personnalité distincte de celle de leurs membres pour l’application des impôts directs, des droits d’enregistrement, de la taxe de publicité foncière ». Aussi, les seules sociétés réellement transparentes visées à cet article sont les sociétés immobilières de copropriété. C’est un souci de neutralité fiscale qui anime cette totale transparence. Le législateur a souhaité soumettre à un régime fiscal identique les copropriétaires et les titulaires de droits sociaux donnant vocation à la jouissance d’une copropriété.
La semi-transparence fiscale[7] concerne les sociétés de personnes visées à l’article 8 du CGI[8]. La semi-transparence signifie que la société présente à la fois des critères d’opacité et de transparence. L’opacité vient du fait que le résultat fiscal est calculé au niveau de la société[9] et que celle-ci dispose d’une personnalité fiscale pour la collecte et la liquidation de certains impôts (TVA, impôts locaux). La transparence se traduit par l’imposition du bénéfice réalisé par la société directement au niveau des associés. Ce sont eux qui paient l’impôt à proportion de leurs droits dans les bénéfices sociaux à raison des bénéfices réalisés par la société et non des bénéfices qu’ils appréhendent.
La translucidité fiscale[10] s’applique aux sociétés d’investissement. Ces sociétés, généralement de capitaux, sont chargées de gérer, pour le compte de leurs clients, des portefeuilles de valeurs mobilières (Société d’Investissement à Capital Variable : SICAV) ou immobilières (Organisme de Placement Collectif en Immobilier : OPCI). Les dividendes et plus-values perçus par la société d’investissement dans le cadre de son objet légal sont reversés aux associés qui sont alors imposés selon le régime normal applicable à ces opérations. La société d’investissement est alors exonérée d’impôt sur les sociétés pour les dividendes et plus-values réalisés pour le compte de ses clients. C’est encore une fois un souci de neutralité fiscale qui anime le législateur. Le traitement fiscal est donc identique pour ceux qui gèrent directement leurs épargnes et ceux qui en confient la gestion à une SICAV ou un OPCI.
L’opacité fiscale. Les nuances de transparence sont nombreuses ainsi que les régimes fiscaux qui les accompagnent. Par ailleurs, il paraît difficile d’entamer notre étude sur la transparence fiscale sans évoquer, malgré tout, le régime d’imposition qui lui est opposé : le régime d’opacité fiscale. Ces sociétés opaques, dotées de la pleine personnalité fiscale, sont considérées comme des contribuables à part entière et ont, à ce titre, un impôt qui leur est propre : l’impôt sur les sociétés. Ainsi, l’article 206 du CGI prévoit que « sont passibles de l’impôt sur les sociétés, quel que soit leur objet, les sociétés anonymes, les sociétés en commandite par actions, les sociétés à responsabilité limitée n’ayant pas opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes ».
La société en commandite : entre transparence et opacité. Il convient également de revenir sur une société au régime fiscal tout à fait singulier qui oscille entre transparence et opacité en fonction de la qualité de l’associé. La société en commandite comporte deux types d’associés : les commandités et les commanditaires. Les associés commandités sont indéfiniment responsables des dettes de la société[11] et bénéficient d’un régime de transparence fiscale[12]. En revanche, les associés commanditaires sont considérés comme de simples apporteurs de capitaux et voient leur responsabilité limitée à hauteur de leurs apports[13]. Aussi, la quote-part de bénéfice qui leur revient connaît un régime d’opacité fiscale[14].
La diversité des régimes de transparence fiscale. Il n’existe donc pas un régime de transparence fiscale mais bien plusieurs régimes de transparence fiscale, établissant donc plusieurs degrés de transparence fiscale. Aussi, notre étude portera essentiellement sur le régime de « semi-transparence fiscale ». A ce titre, nous retiendrons volontairement, lors de nos développements, le vocable général de « transparence fiscale » pour désigner le régime de « semi-transparence fiscale ». Ainsi, nous prendrons le soin de préciser lorsqu’il s’agit d’un autre régime de transparence fiscale, tel le régime de « transparence fiscale pure » ou encore le régime de « translucidité fiscale ».
La transparence fiscale antérieurement à l’impôt sur les sociétés[15]. Historiquement, seules les personnes physiques bénéficiaient d’une réelle personnalité fiscale. A ce titre, la création de l’impôt sur le revenu par la loi du 15 juillet 1914 ne prévoyait pas encore l’assujettissement à l’impôt des personnes morales. Cependant, les bénéfices réalisés par les personnes morales ne se voyaient pas pour autant exonérés d’impôt. En effet, l’impôt sur le revenu des personnes physiques était « établi d’après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque contribuable[16]». Les bénéfices des personnes morales se trouvaient donc être imposés directement entre les mains des associés personnes physiques au titre de l’impôt sur le revenu. Nous étions alors en présence d’un régime de transparence fiscale où seule la personnalité du contribuable personne physique était reconnue. Il fallut attendre la loi du 31 juillet 1917, et la création d’une cédule spécifique aux bénéfices industriels et commerciaux, pour que les entreprises soient directement assujetties à un impôt assis sur leurs bénéfices[17].
La transparence fiscale postérieurement à l’impôt sur les sociétés[18]. Le décret du 9 décembre 1948 modula notre système fiscal en créant une imposition spécifique destinée aux sociétés : l’impôt sur les sociétés. Cette « nouvelle » imposition, qui ne constituait en réalité qu’une reprise de la cédule des bénéfices industriels et commerciaux, permettait de reconnaître aux sociétés assujetties à l’impôt sur les sociétés une pleine et entière personnalité fiscale. Le régime de transparence fiscale se voyait alors uniquement attribué aux sociétés de personnes. A cet égard, le Doyen Trotabas relevait déjà, en ce qui concerne les sociétés de capitaux, que « le principe de la personnalité de l’impôt[19]» ne pouvait aucunement être appliquée. Cependant, les sociétés de personnes laissant plus facilement découvrir l’individu, il est apparu possible de leur appliquer des règles spécifiques[20]. Ainsi, seules les sociétés, dites de personnes, connaissant une responsabilité illimitée des associés, bénéficiaient du régime de transparence fiscale[21]. »
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